L’organisation professionnelle allemande Ost-Ausschuss, qui regroupe les entreprises actives en Europe centrale et de l’est, a adressé à Nancy Pelosi, Présidente de la Chambre des Représentants, une missive réclamant la reprise du partenariat transatlantique et un retrait des sanctions extraterritoriales visant le gazoduc Nord Stream 2. Les entreprises allemandes nourrissent de grands espoirs quant à l’avenir des relations avec les Etats-Unis depuis l’élection de Joe Biden. Ces espoirs risquent toutefois d’être contrariés dans la mesure où les sanctions CAATSA (Countering America’s Adversaries Through Sanctions Act) et PEESCA (Protecting Europe’s Energy Security Clarification Act), visant notamment le gazoduc, devraient être fusionnées et intégrées au National Defense Authorization Act de 2021. Le texte pourrait aller encore plus loin et permettre de sanctionner également les assureurs et les organismes de certification technique associés au projet. 120 entreprises européennes sont affectées par ces sanctions.

Le gazoduc Nord Stream 2 semble d’autant plus sur la sellette que les Etats-Unis ont annoncé la Three Seas Initiative, comme faisant partie des projets prioritaires. Réunissant 12 pays d’Europe centrale et de l’est (Pologne, Bulgarie, Autriche, Croatie, Estonie, Lituanie, Lettonie, République tchèque, République slovaque, Hongrie, Roumanie et Slovénie), cette alliance nord-sud a été créée en 2015 par la Pologne (très hostile au gazoduc Nord Stream 2) et la Croatie. Elle a pour objectif de permettre une plus grande intégration des infrastructures énergétiques (terminaux gaziers + pipelines), numériques (autoroute digitale + villes intelligentes + marketplace) + et de transport.

Washington, qui dispose d’un statut d’observateur, est devenu son plus gros contributeur. Il s’agit d’un projet qui, outre l’influence de la Russie, entend également contrarier l’initiative chinoise 17 +1.

Après le dernier sommet qui s’est déroulé le 20 octobre, les Etats-Unis ont décidé de s’engager financièrement au sein du fonds d’investissement de la 3SI, créé en 2019. Le gouvernement américain prévoit ainsi d’affecter un montant totalisant 30 % de toutes les contributions effectuées par les pays concernés à ce fonds, qui s’élève aujourd’hui à près de 1 Mrd €. Cet engagement financier, effectué via l’IDFC, pourra atteindre 1 Mrd $. Outre le gaz de schiste, pour lequel Washington entend trouver des débouchés, les Etats-Unis tablent également sur l’initiative « Smart Connectivity » annoncée lors du dernier sommet de Tallinn et pour laquelle Google et Microsoft sont déjà sur les rangs. Les projets en termes d’équipements nucléaires civils, bien que non inclus dans la Three Seas Initiative, sont également en ligne de mire, tant en Pologne, qu’en Roumanie, en Slovénie, en Bulgarie (où un protocole d’accord a déjà été conclu) et en Ukraine.

Autre signe de l’influence américaine prégnante sur le projet, l’adoption, le 18 novembre, par la Chambre des Représentants d’une résolution bipartisane en soutien à la Three Seas Initiative. Selon les termes de cette résolution, l’US International Development Finance Corporation, en vertu de l’European Energy Security and Diversification Act de 2019, sera habilitée à soutenir les projets de développement des infrastructures énergétiques de ces pays. Elle pourra également être sollicitée pour contrecarrer ou bloquer des mesures qui pourraient être prises par un concurrent des USA en vue de s’assurer une influence politique ou économique dans cette zone géographique, ou bien en vue d’acquérir des technologies ou des infrastructures sensibles dans un (des) pays allié ou partenaire des USA.

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