Les conflits liés à la propriété intellectuelle en Chine pourraient s’envenimer et constituer de nouveaux obstacles pour les entreprises étrangères, comme l’a récemment évoqué le Wall Street Journal (également accessible ici). Selon le journal économique, et comme le décrit aussi le Special 301 Report paru en avril dernier, les autorités chinoises tentent, depuis quelque temps, de détourner le principe juridique de l’anti-suit injunction (« injonction anti-poursuites » ) au bénéfice de ses propres entreprises. Ce principe permet, dans son usage habituel, d’empêcher une partie adverse d’engager ou de poursuivre une procédure identique dans une autre juridiction. Or depuis 2020, les tribunaux chinois ont prononcé à 4 reprises des injonctions anti-procès, s’arrogeant la primauté de la décision rendue et cherchant à bloquer les possibilités pour les entreprises étrangères de défendre leurs secrets commerciaux partout dans le monde en imposant des pénalités sévères à celles qui tenteraient de s’y soustraire. La première affaire (pour laquelle les deux parties ont trouvé un accord en août dernier) a opposé InterDigital (Delaware) à Xiaomi. Le différend portait sur les royalties des licences de brevets accordées au groupe chinois. La seconde affaire a opposé Conversant Wireless Licensing à Huawei ; la troisième, Oppo à Sharp (toujours en cours) et la quatrième, entre Samsung et Ericsson, a permis au groupe coréen d’obtenir gain de cause. La tactique employée laisse penser que la Chine entend faire régner sa vision en matière de propriété intellectuelle. Ces procédures longues et couteuses permettent surtout aux groupes chinois d’obtenir l’avantage pour négocier des licences à moindre coût.

L’Union Européenne, qui s’inquiète de cette nouvelle tendance, a fait part de ses préoccupations à la Chine, via l’OMC. Le questionnaire qui a été adressé à Pékin portait notamment sur les directives suivies pour statuer sur les questions d’injonction anti-poursuites, sur les pénalités infligées aux entreprises et sur la légitimité de ses tribunaux en la matière. Les autorités chinoises ont refusé de répondre aux questions qui lui ont été soumises, indiquant que le pays agissait conformément aux principes élaborés dans le cadre de l’accord TRIPS (aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce). Elles ont par ailleurs indiqué qu’un traitement bilatéral avec l’UE serait plus indiqué pour évoquer ce sujet.

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